L’histoire d’Amleth a été contée par Saxo Grammaticus au XIIIe siècle dans ses Gesta Danorum (Dumez, 2012). Nulle ambiguïté dans son récit, comme en témoigne le titre de la traduction française faite par François de Belleforest au XVIe siècle : Avec quelle ruse Amleth, qui depuis fut Roy de Dannemarch, vengea la mort de son pere Hordenville, occis par Fengon son frere, et autre occurence de son histoire. L’oncle d’Amleth a tué son frère et épousé sa belle-sœur. Une fois Amleth devenu adolescent, le nouveau roi ourdit la mort de son neveu et beau-fils, dont il craint la vengeance, qui sera effectivement implacable. L’identité de l’assassin est claire. Nombre d’éléments du récit de Saxo se retrouvent dans la pièce de Shakespeare. Mais l’histoire se trouve pourtant profondément altérée. Ce qui frappe le spectateur de cette pièce impossible tant, dans sa version pleine, elle est longue (au point qu’elle est généralement coupée à la scène et ce depuis sa création ), ce sont les hésitations d’Hamlet (qui n’ont rien à voir avec le comportement de l’Amleth de Saxo qui feint la folie pour échapper à la mort et préparer sa vengeance) et son comportement incohérent, notamment à l’égard d’Ophélie, si violent, et ce brusquement et sans raison apparente, qu’il finit par entraîner la mort de l’infortunée jeune femme.

Auteur: Hervé Dumez

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