Perclus, le Béotien s’extrait enfin de sa voiture, qu’il n’est parvenu à garer que tout en haut du village, et descend la route qui le ramène vers l’église abbatiale, but de son voyage. Il ne vient pourtant de parcourir que trente-six kilomètres, ceux de la route sinueuse et encombrée qui mène de Rodez à Conques.

Le Petit Pèlerin du douzième siècle éprouvait-il le même soulagement, lui qui venait de parcourir à pied, en un temps qui devait avoisiner la semaine, 180 kilomètres depuis le Puy-en-Velay ? Sa route, appelée, en raison de son point de départ, « via podensi », l’un des quatre grands itinéraires du pèlerinage vers Saint-Jacques-deCompostelle, allait encore l’emmener vers Cahors et Moissac, le col de Roncevaux, Puente-la-Rena, Burgos, Léon, Villafranca, et enfin, Saint-Jacques, but ultime du voyage. Près de 1300 kilomètres en tout !

Le tympan sculpté de l’église s’offre au regard du premier tel qu’il s’offrait à celui du second. Il représente un Jugement Dernier. C’est l’une des compositions les plus somptueuses de l’art roman : les Savants s’accordent à le dire, et le Béotien, sorti fourbu et transpirant de son auto, encore baigné des chaudes puanteurs des échappements diesel, ne manque jamais de confirmer ce jugement : « Que c’est beau ! » « Que c’est étonnant ! » « Que c’est admirable ! » « Que c’est amusant ! »…

Auteur: Jacques Girin

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