S’il y a bien un point sur lequel tous les chercheurs en gestion (pour ne s’en tenir qu’à notre discipline) sont d’accord, c’est qu’ils croulent sous les lectures à faire. On n’y parvient jamais. Les piles de livres se renversent, les photocopies jaunissent, les articles téléchargés se perdent dans le disque dur. Faire de la recherche paraît quelquefois comme une course sans espoir derrière une bibliothèque mouvante. Et cette impératif de lecture entre bien entendu en concurrence avec d’autres activités, avec même les autres composantes de l’activité de recherche : le terrain, la réflexion, l’écriture, la valorisation. Quel est le temps de lecture incorporé dans une thèse ou dans un article de revue de premier rang ? Je propose une manière simple de le calculer. Admettons qu’une thèse comporte 200 références, un article 50 (estimations plutôt basses) ; que ces références soient composées à 90% d’articles et 10% d’ouvrages (c’est la tendance) ; qu’un ouvrage demande quatre fois plus de temps de lecture qu’un article ; qu’un article comporte en moyenne 20 pages ; et qu’une page demande de 5 à 10 minutes de temps de lecture (ce n’est pas un roman). Arrondissons à trois heures par article. On a donc (en arrondissant encore un peu) 200 heures de lecture incorporées dans un article et 800 dans une thèse. Ou, si l’on traduit en jours sur une base encore une fois grossière de sept heures par jour, on obtient 28 jours de lecture pour un article et 112 pour une thèse. Encore faut-il identifier les références pertinentes, ce qui suppose d’autres lectures qui n’apparaîtront pas dans la bibliographie finale. Quelle est au final la proportion de lectures utiles ? Une sur dix, estimait Paul Valéry (d’après ce que m’en dit un spécialiste de cet auteur, que pour ma part je n’ai pas lu). Faudrait-il donc multiplier notre estimation par 10 ?

Auteur: Hervé Laroche

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