Ne le répétez pas : le positivisme est mort depuis belle lurette. À cette nouvelle, certains, soit qu’ils persistent à s’y référer, soit qu’ils continuent à tirer sur lui à boulets rouges, pourraient bien en faire une attaque. Gardez-là donc pour vous, et surtout n’ajoutez pas : mais le programme de réflexion qu’il a amorcé, même si tout le monde sait (enfin, dans les cercles un peu renseignés) qu’il a échoué, a joué un rôle décisif dans la pensée de la science et continue de nourrir cette pensée par delà son échec. Là, des dépressions seraient à craindre. C’est pourtant ce qu’explique Jacques Bouveresse dans son dernier livre, Essais VI. Les lumières des positivistes :

 

Le positivisme logique, la dernière en date des grandes philosophies positivistes, est aujourd’hui aussi mort qu’un mouvement philosophique peut jamais l’être, mais en un certain sens, pas plus. Tous ses « dogmes » fondamentaux – le vérificationnisme, la distinction tranchée entre les propositions analytiques et les propositions synthétiques, la dichotomie observationnel/théorique, la conception des théories scientifiques comme calculs formels partiellement interprétés, l’existence d’une base de confirmation autonome, stable et uniforme pour tous les énoncés scientifiques, etc. – ont été depuis un certain temps déjà contestés, modifiés ou abandonnés, quelquefois par les survivants du mouvement eux-mêmes. Mais il a laissé un héritage important qui, comme pour tout mouvement philosophique, constitue la seule chose à prendre en considération à l’heure du bilan. (Bouveresse, 2011, p. 47)

 

Nous allons nous servir librement de ce livre (en espérant que son auteur nous le pardonne) pour revenir sur les débats épistémologiques qui animent les sciences de gestion.

Auteur: Hervé Dumez

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